Stephan Boschat lettre Le Badge
Urban Comics a confié le lettrage BD de l’événement Le Badge au studio MAKMA. Ce crossover qui réunit Batman et Flash, les super-héros vedettes de DC Comics, introduit un élément intrigant dans l’univers pas si tranquille de ces personnages. Nous avons posé quelques questions au lettreur Stephan Boschat qui a travaillé sur le livre DC Univers Rebirth : le Badge.
Salut Stephan, tu as récemment lettré Le Badge. Tu as ressenti un certain enjeu ?
Stephan Boschat : Personne n’ignore que Watchmen a marqué un tournant dans le monde des comics. J’adore le relire pour découvrir des petits détails non perçus lors de mes lectures précédentes. Bref, je mesure l’attente provoquée par la confrontation dans Le Badge des deux univers culte que sont ceux de DC Comics et de Watchmen. Même si je relativise l’importance du lettrage, je sais que je participe au petit bout d’un ensemble sur lequel reposent de grands espoirs. Bref, si c’est mal lettré, peu lisible, ça craint sévèrement. Ouais, j’ai ressenti un petit enjeu quand même. Mais surtout, quand tu reçois la proposition de ton éditeur, tu ressens une petite bouffée de fierté.
Est-ce que tu peux nous dire si tu avais des consignes particulières pour ce crossover événement ?
Stephan Boschat : Quand Yann Graf (éditeur chez Urban Comics) m’a transmis le planning, il m’a seulement indiqué qu’il y aurait sans doute un preview du Doomsday Clock dans Le Badge, et qu’il fallait conserver l’épilogue. Le seul truc que je peux indiquer sans spoiler c’est que l’épilogue et le preview sont bel et bien présents dans l’album et que ça donne l’eau à la bouche. Une des consignes principales était de conserver la typo DaveGibbons et ses variantes dans ce cas. Et je peux vous garantir que l’impact graphique de la police de caractères choisie a des conséquences évidentes sur le résultat final.
Entre Batman et Flash, qui est le meilleur détective ?
Stephan Boschat : Pour réfléchir et répondre correctement à cette question, je pars du postulat que Batman possède une capacité de raisonnement, une intelligence de la déduction en quelque sorte, qui n’est pas liée uniquement à une question de rapidité. C’est une sorte de génie. Tu pourras prendre le temps que tu veux, tu n’arriveras jamais à reproduire son raisonnement, sauf cours particuliers. Je commence par ce point parce que je me suis souvent fait la remarque que si Flash pouvait réfléchir aussi vite qu’il pouvait bouger (ce serait d’ailleurs aussi valable pour Superman dans une autre mesure) alors, il arriverait forcément plus vite à une solution que n’importe qui, Batman compris. Par ailleurs, il peut chercher des indices plus vite que quiconque dans une pièce. Il a donc de nets avantages. Disons que tous les deux ont un point commun, ils ont des connaissances sensiblement identiques sur les techniques d’enquête, les méthodes scientifiques à la pointe. Mais la vraie différence qui va résider entre eux, c’est le référentiel, l’angle de vue. Un peu comme quand tu vas chercher pendant des plombes un truc que tu as rangé, alors qu’il est sous tes yeux, et que ton épouse, pour ne pas la nommer, va le trouver du premier coup. Eh bien, je pense que Batman possède le référentiel parfait qui fera toujours de lui le meilleur détective. Et je ne dis pas ça parce qu’il n’a pas de super-pouvoirs, hein !
Que t’inspire Le Badge, ce prologue à Doomsday Clock ?
Stephan Boschat : Ce qui est marrant quand tu es concentré sur l’organisation du texte de la traduction française dans les bulles, c’est que tu fais attention à des points très précis d’un comic book. Mais tu finis par passer à côté de l’essence de l’histoire, celle que tu ressens lorsque tu lis un bouquin confortablement installé au fond de ton canapé. Par exemple, dans Le Badge, au premier épisode, au moment de lettrer, j’avais été sensible au rythme des premières pages lors du combat entre Batman et Néga-Flash. Le Chevalier Noir se prend quatre coups de poing en l’espace d’une seconde, et lui rend un coup par seconde. Je m’étais fait la remarque que, finalement, le Professeur Zoom n’était pas si rapide que ça… En fait, grâce à ces questions, j’ai pris le temps de relire cet album avec un regard de lecteur que j’avais un peu perdu. Merci pour ça.
Ce prologue à Doomsday Clock est plein de promesses. Je relis chacune des cases de la fin de l’album, images et textes, et j’en apprécie autant le fond que la forme. Du coup, je vais me replonger dans ma bibliothèque et relire Watchmen de ce pas !
Merci, Stephan. Bonne relecture et bon lettrage, alors !