Maxime Le Dain, traducteur de Flash

Publié le 17 mars 2023
Maxime Le Dain avec le tome 5 de Geoff Johns présente Flash, qu'il a traduit.

Maxime Le Dain, traducteur de Flash, a accepté de répondre à nos questions. Il nous parle de son expérience sur l’adaptation des dialogues de Geoff Johns ainsi que de son ressenti envers la saga Geoff Johns présente Flash, parue chez Urban Comics.

Traduire Geoff Johns, la légende

Geoff Johns est le scénariste de la série Flash, est-il difficile à traduire, selon toi ?

Maxime Le Dain : Je vais faire une réponse de Normand, mais… oui et non ! Si ses textes restent généralement dans les clous du tout-venant super-héroïque par rapport au niveau de langue ou de l’écriture elle-même, ils présentent tout de même quelques défis au traducteur. D’abord, il y a son goût pour les jeux de mots et les double sens, ces derniers s’avérant très pratiques pour les transitions (une technique empruntée à Alan Moore, que Johns admire comme pas mal de monde dans le milieu, et qui en avait fait sa marque de fabrique à ses débuts). Ainsi, il s’amusera à creuser les champs sémantiques et à employer toutes sortes d’idiotismes liés à la chaleur dès lors que Heat Wave entrera en scène. De même avec Captain Cold ou la Toupie (« The Top » en anglais, terme très versatile qui offre à l’auteur bien plus de possibilités de jeux de mots que notre « Toupie » francophone, ce qui m’a poussé à aller plutôt puiser dans les champs lexicaux du tournoiement, du vertige, de la spirale, etc).

Il faut aussi souligner que Johns adore l’intertextualité, c’est-à-dire qu’il cite très souvent d’autres comics, jouant à fond le jeu de la continuité. Dans ces cas-là, je me suis efforcé d’aller chercher les traductions françaises des œuvres évoquées, quand elles existaient, afin d’apposer à la continuité VO notre propre continuité VF – par respect pour les lecteurs qui auraient ces titres chez eux, déjà, mais aussi pour les traducteurs passés avant moi. J’ai pu compter sur deux immenses et précieuses banques de données pour cette partie du taf : d’une part l’indispensable site Comics VF, l’encyclopédie des comics en version française, qui référence tout ce qui est sorti en VO et en VF depuis Action Comics n°1, pour faire court ; de l’autre, sur le cerveau quasi-MODOKien de Jean-Marc Lainé, qui a travaillé comme préparateur sur les Geoff Johns présente Flash n°5 & 6 (et peut-être les précédents, mais je ne suis pas au courant). Un grand merci à lui.

Un amour sincère envers les super-héros

Qu’est-ce qui différencie Geoff Johns des autres scénaristes que tu as traduits ?

Maxime Le Dain : Ce qui me plaît avant tout chez lui, c’est le plaisir évident qu’il prend à s’emparer de l’univers DC dans son intégralité. À se glisser dans sa continuité et à aller y chercher des personnages oubliés, ringard et vieillots pour les remettre sur le devant de la scène. On dirait un enfant qui, dans le grenier de la maison familiale, retrouverait la malle à jouets de ses parents ou grands-parents et les intégrerait à ses jeux – tout en les teintant d’une certaine maturité adolescente. Parfois un peu trop à mon goût, d’ailleurs. Certains récits ou backgrounds de persos me paraissent un peu trop violents ou cruels pour le monde coloré de Flash. Mais c’est aussi une époque : les années 2000 étaient encore sous l’effet de l’onde de choc des Watchmen et Dark Knight. Il restait de bon ton de « psychopatiser » les vilains (et parfois même les héros), bien souvent au mépris d’une compréhension réelle des pathologies psychiatriques. Bref, Johns, c’est un peu tout ça à la fois : un gamin surdoué à qui on a confié l’usine à jouets, et un post-ado qui tente d’y insuffler la complexité du monde (sans tout le temps y parvenir).

Est-ce que tu as apprécié traduire cet auteur en particulier ?

Maxime Le Dain : Eh bien, j’ai été ravi de pouvoir « goûter » à sa prose. Geoff Johns est clairement doué, et il voue un amour sincère aux super-héros.

Traducteur de « Geoff Johns présente Flash »

Que retiens-tu de tous les épisodes de Flash que tu as traduits ?

Maxime Le Dain : Les Lascars ! J’adore ce qu’il a fait avec ces vilains très has been, qu’il a ressuscités et étoffés avec brio. Ce faisant, il a offert à Wally West une vraie galerie d’adversaires dignes de son pouvoir : foutraques, dangereux et paradoxalement touchants, tant leurs interactions sont marrantes et bien amenées. Bref, c’est selon moi LE point fort de son run. J’y ajouterais une fascination profonde pour Flash et son pouvoir, qui en font à mes yeux un des super-héros les plus envoûtants jamais créés : avec le pouvoir de voler, celui de filer à la vitesse de l’éclair me paraît être un archétype profondément inscrit dans la psyché humaine. Et ça, Johns l’a bien compris.

En tant que traducteur de Flash, quel est ton meilleur souvenir du comic book ?

Maxime Le Dain : Les étoiles dans les yeux de mes fils lorsqu’ils me voyaient bosser sur des cases où Flash se démultiplie en pleine course. Comme je le disais, il y a quelque chose dans la super-vitesse qui fascine, qu’on soit adulte ou enfant.

Merci Maxime, d’avoir accepté de répondre à nos questions !

 

Maxime Le Dain posant avec son chien et un exemplaire de "Geoff Johns présente Flash".
le traducteur de Flash Maxime Le Dain posant avec son chien et un exemplaire de son travail.