Gaël Legeard au lettrage des comics Zorro
Le lettrage est une étape cruciale dans la création d’une bande dessinée, influençant directement l’expérience de lecture. Dans cette interview, notre lettreur BD Gaël Legeard nous dévoile les différentes étapes de ce processus complexe, ses défis et son plaisir à travailler sur les comics Zorro de Sean Murphy.
Gaël, tu t’es occupé du lettrage « complet » de ce titre. Peux-tu nous expliquer plus en détail en quoi consistent les étapes ?
Gaël Legeard : Il y a en effet plusieurs étapes différentes lors du lettrage. Tout d’abord, on s’occupe de créer la maquette en suivant les indications du client (le chemin de fer) à partir des fichiers originaux. Ensuite, il y a une étape de nettoyage pour retirer tous les textes anglais, suivie d’une étape d’intégration de la traduction sur la maquette. Après cela vient l’étape de calage, durant laquelle on va vraiment mettre en forme tous les textes pour qu’ils suivent la forme des bulles et soient agréables à lire (c’est aussi pendant cette étape qu’on s’occupe des incrustations de textes sur l’image en arrière-plan, s’il y en a). Enfin, il y a une dernière étape de corrections, effectuée en commun avec l’éditeur afin d’apporter des améliorations sur le texte pour que la lecture soit la plus limpide et la plus plaisante possible.
En quoi toutes ces étapes sont-elles importantes ?
Gaël Legeard : Chaque étape apporte petit à petit sa pierre à l’édifice et si une seule d’entre elles est ratée, c’est tout le livre qui risque d’en pâtir.
As-tu apprécié lettrer ce bouquin ?
Gaël Legeard : Oui, c’est toujours un réel plaisir de travailler sur des tomes d’auteurs que j’apprécie, et Sean Murphy rentre très clairement dans cette catégorie. Par ailleurs, principalement depuis son Batman White Knight, il arrive toujours à insuffler un souffle nostalgique dans ses récits, sans tomber pour autant dans le simple « fan service » un peu facile, et en créant toujours des récits inattendus, fluides et captivants. J’attendais donc très impatiemment sa vision de la légende de Zorro !
Es-tu satisfait de ton travail ?
Gaël Legeard : Bien sûr ! Étant moi-même un grand lecteur de comics, et appréciant beaucoup le catalogue d’Urban, j’essaie toujours de rendre un travail impeccable, à la fois pour être digne des efforts de l’auteur, mais aussi pour mettre les futurs lecteurs dans les meilleures conditions afin de découvrir les récits proposés.
Quels sont les défis les plus courants que tu rencontres lors du lettrage d’une bande dessinée ?
Gaël Legeard : Essayer de garder un lettrage le plus proche possible de la version originale, quand bien même la traduction impose des changements parfois drastiques. Il faut réussir à modifier le visuel sans trop le dénaturer.
C’est Benjamin Rivière, du studio MAKMA, qui s’est occupé de la traduction de ce bouquin. Dans ces cas-là, comment se passe la collaboration ? Est-ce plus simple au niveau de l’organisation ?
Gaël Legeard : C’était bien plus simple, car j’ai un contact direct et je peux échanger avec lui plus aisément. Et ça l’était d’autant plus sur ce projet : étant donné qu’on a travaillé dans un délai très court, Benjamin a dû travailler sur le script de chaque chapitre (et non sur la version finale), afin de rendre une traduction au plus vite pour que je puisse l’intégrer dès que Sean Murphy bouclait un épisode. De ce fait, le rendu final n’était pas toujours exactement identique à la version du script et il fallait vite reprendre les divers endroits qui avaient été modifiés. La réactivité de Benjamin, et le fait que nous travaillons tous les deux avec MAKMA nous a permis de pallier ce souci sans mettre en péril l’emploi du temps déjà serré que la publication de ce tome imposait.
Pour finir, aurais-tu une anecdote à nous raconter au sujet de ton travail sur Zorro ?
Gaël Legeard : Le fait le plus inhabituel sur ce projet, c’est qu’il s’agit d’un ouvrage financé à la base via Kickstarter, ce qui nous a fait travailler directement dans la foulée des rendus de l’auteur, et ce, avant même qu’un seul chapitre ne soit rendu public, rendant le tout très intense. Surtout qu’il y avait trois tomes différents à rendre en même temps, le titre étant sorti sous diverses versions (classique, noir & blanc, et une édition pour l’enseigne Pulp’s comportant uniquement les croquis).
Les comics Zorro : un récit anachronique
Et en ce qui concerne le récit, je ne saurais trop indiquer un seul passage préféré, car plusieurs me viennent en tête, mais je sais que ce qui m’a le plus plu dans l’ouvrage, c’est l’idée folle mais excellente de ramener à une époque plus proche de la nôtre un personnage aussi anachronique que Zorro — un simple cavalier armé d’un fleuret —, ce qui semble complètement dépassé face aux véhicules et aux armes d’un cartel de la drogue. Et pourtant, ça marche et on est captivé !
Merci Gaël pour toutes ces précisions !
En revisitant la légende de Zorro, notre équipe a su relever de nombreux défis pour offrir un résultat à la hauteur des attentes. Grâce à une collaboration étroite et un travail minutieux, le lettrage a contribué à sublimer cette œuvre, en garantissant une immersion totale pour les lecteurs des comics Zorro.