Traduction de comic books : Edmond Tourriol, le spécialiste

Publié le 09 avril 2020

Traduction de comic books et scénario de BD sont les deux activités d’auteur principalement menées de front par Edmond Tourriol, fondateur du studio MAKMA avec son associé Stephan Boschat qui dirige le pôle graphisme/lettrage.

Edmond, comment en es-tu venu à t’intéresser aux comics ?

Edmond Tourriol : Eh bien, pour commencer, c’est avec les comics que j’ai appris à lire ! Par la suite, j’ai pu apprendre l’anglais par le biais de la lecture des comics en VO. Je voulais faire de la BD, être auteur, mais je n’ai jamais dessiné pour le studio. Mon niveau n’était pas assez bon. Alors, j’ai choisi de me spécialiser en tant que scénariste pour Climax Comics, un studio amateur que j’avais créé avec mon pote Olivier Dejeufosse. L’équipe était alors celle qui constituerait le futur MAKMA. Le studio tel qu’on le connait a été officialisé en 2003, au sein de la SARL Clark System Innovation que nous avions créée en 2001. Bientôt vingt ans !

Des débuts dans le fanzinat

C’est avec Climax Comics que j’ai appris le travail de maquettiste, et que j’ai commencé le lettrage. L’avantage, c’est que je pouvais l’effectuer sur ordinateur sans manquer de technique graphique manuelle. J’ai appris à créer des bulles avec Corel Photopaint, Adobe Photoshop, puis Quark Xpress et Indesign. Mais maintenant, je n’ai plus le temps de lettrer quoi que ce soit. Et de toute façon, je n’ai plus le niveau. Stephan et son équipe de lettreurs maquettistes m’ont surpassé depuis longtemps !

C’est en étant président de l’association Climax Comics que je me suis essayé comme chef d’équipe créative. J’ai commencé à gérer un scénariste, un dessinateur, un encreur, un coloriste, un correcteur et un lettreur. C’est aussi comme ça que le groupe s’est agrandi.

Traduction de comic books : un rêve qui devient réalité

Au moment où nous avons souhaité nous professionnaliser, j’ai quitté mon rôle au sein de Climax Comics pour me consacrer au développement de Clark S.I., notre société. Au bout de quelques mois de galère, j’ai eu l’opportunité de devenir traducteur de comics américains pour les éditions Semic. Depuis, je suis intervenu sur des centaines d’épisodes de comics dont Superman, Batman, Teen Titans, Invincible ou Walking Dead. Avec la traduction de comic books j’ai touché mes premiers revenus professionnels dans l’univers de la bande dessinée, et c’est grâce à elle que je gagne ma vie aujourd’hui.  On a commencé  la vente de services BD avec le métier de traducteur de bandes dessinées, et cette professionnalisation nous a permis de rester dans le milieu.

Toi qui voulais devenir auteur en premier lieu, as-tu vécu une certaine frustration en devenant traducteur ?

Edmond Tourriol : Il y a certes, avec la traduction, une certaine frustration de ne pas écrire ses propres œuvres, mais j’ai une grande satisfaction doublée d’un intérêt certain pour ce que je fais. Quand j’ai débuté dans la trad en 2001, c’était un rêve qui devenait réalité : j’allais bosser sur les héros de mon enfance ! En outre, avec l’adaptation de comics, on n’a pas l’angoisse de la page blanche !

Agence de traduction BD, de transcréation et de localisation : MAKMA. Illustration The Walking Dead (TWD) Negan © Skybound Entertainment et © Groupe Delcourt pour la VF. MAKMA's been translating and lettering comics since 2001.
Illustration The Walking Dead (TWD) Negan © Skybound Entertainment et © Groupe Delcourt pour la VF

 

La traduction de comic books n’est pas qu’un affaire de conversion de mots

Que penses-tu du niveau des traducteurs d’aujourd’hui ?

Edmond Tourriol : Selon moi, le public et les fans croient toujours savoir parler anglais. Mais savent-ils vraiment le parler ou le comprendre ? C’est une autre histoire. Tant qu’elle touche à la littérature, la traduction pose des problèmes littéraires d’adaptation. Ce n’est pas juste une affaire de conversion de mots.

Avec la scantrad et la fantrad, on a l’impression que tout le monde peut parler anglais être traducteur, et c’est certainement vrai. Néanmoins pour le devenir, il faut une bonne maîtrise de l’anglais d’une part, et une maîtrise irréprochable de sa langue maternelle. Et c’est souvent cette maîtrise qui fait défaut et piège le spectateur en l’enfonçant dans l’erreur. Dans l’absolu, je n’ai rien contre le principe même de la fantrad. Mais sur des milliers de traducteurs autoproclamés, il y en aura peu seulement qui seront à la auteur du job. Vis-à-vis de la corruption de la vérité, Aristote dit qu’il est pire de tromper quelqu’un sans le savoir plutôt que de le tromper en connaissance de cause. Voir un film en VO pour lire des sous-titres sans maîtriser la langue d’origine, c’est s’exposer à cette erreur qu’une fantrad aurait pu commettre sans le savoir, par manque de connaissances. Et je ne parle pas du niveau de français souvent déplorable qu’on rencontre dans le milieu amateur. Les gens ont pris l’habitude de se contenter du moins-disant. C’est assez terrible en matière d’impact sur notre société.

Merci, Edmond. Et bravo pour ta récente traduction de Fire Power, le dernier comic book de Robert Kirkman.

Edmond Tourriol : Hahaha… merci et à bientôt !

Fire Power VF : une traduction de comics signée Edmond Tourriol
Fire Power VF : le comic book de Robert Kirkman et Chris Samnee, traduit en français par Edmond Tourriol